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Cultures & Conflits
no 77, printemps 2010, Paris
Vancouver n’est
pas là où il devrait être...
Entretien avec Landon Mackenzie,novembre 2009,
Paris
Réalisé par Didier BIGO, traduit
par Simon Ouedraogo. |
Landon Mackenzie est connue pour ses cartes et ses
peintures de grand format autant que pour son expérience
en recherche cartographique. Son travail est présent
dans les collections de nombreux musées à travers
le Canada, notamment la Vancouver Gallery et la National
Gallery of Canada. Elle enseigne à l’Université de
design et d’art Emily Carr à Vancouver.
DB : Landon, à travers votre
peinture vous remettez en cause la représentation
traditionnelle du monde, en tant que monde constitué d’Etats
(absence de frontières nationales),
mais aussi la conception de géographie naturelle
(sans distinction aucune entre terres et mers), et
les effets de cette remise en question sont surprenants.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette éradication
des frontières au sens traditionnel
du terme ?
LM : Il s’agit ici d’une
pièce particulière intitulée «Vancouver
as the centre of the world»,
dont l’idée m’est venue en pensant à la
manière dont on pourrait réorganiser
le monde en un espace rectangulaire dont Vancouver
serait le centre ; et cette géographie
semblait vraiment inhabituelle. Cela impliquait de
placer la Russie au-dessus du Canada et par-dessus
le pôle Nord, le tout sans utiliser d’ordinateur
pour le représenter. J’ai commencé par
me procurer certaines des cartes les plus vendues et
les plus couramment utilisées. C’est-à-dire
celles où le Groenland est long et étroit,
celles où il est grand et large, et alors que
je m’apprêtais à les
acheter le vendeur du magasin m’a dit «vous
savez, le Groenland est en fait plus petit que le Zaïre».
Bien que cela soit quelque chose que l’on sait,
c’est tout de même un réel choc
d’entendre parler de cette déformation,
car en fait nous commençons à croire
en ce que nous disent les cartes!
J’ai examiné la
déclaration de
ce vendeur, et deux choses se sont produites. La première
c’est que j’ai immédiatement
repensé le problème du nom et de ce qu’il
représente sachant que plusieurs
noms sont rattachés à ces deux endroits
que ce soit des noms contemporains, historiques, coloniaux,
précoloniaux ou linguistiques. La seconde est
que le pays en question, actuellement nommé «République
démocratique du Congo»,
situé au centre de l’Afrique et sur l’équateur,
est effectivement plus grand en terme de kilomètres
carrés que cet espace au nord, bien que l’image
que chacun de ces espaces renvoie au monde soit très
différente.
Ajoutez à cela le fait bien réel que
le Groenland rétrécit à mesure
que la calotte glacière fond, et qu’il
est encore plus petit maintenant qu’au moment
où les mesures on été prises.
De plus, une carte n’explique pas pourquoi cet
endroit ne fait pas partie, au sens politique du terme,
du Canada comme les autres îles arctiques de
la région.
Pour lire la pleine entrevue avec des illustrations, téléchargez
le formulaire pdf